looking for the pieces of our broken plans.

FILM FAVORI - la piel que habito de pedro almodóvar. métaphore même de la soumission à l'autre. relation malsaine et dévastatrice. film aussi étrange qu'envoûtant.
LIVRE FAVORI - anna karénine de léon tolstoï. héroïne qu'il a fantasmé à chaque lecture. à chaque mot qui a fait briller ses iris. passion coupable ; passion dévastatrice. passion qu'il a rêvé de vivre, de trouver. culpabilité remplacée par la nécessité de la vivre. livre phare qui ne quitte pas son chevet.
CHANSON DU MOMENT - il n'est guère adorateur de musique. parfois un peu de classique pour la forme. les mélodies douces qui viennent bercer le creux de son oreille, quand il a besoin de calme. rien de plus.
COULEUR PRÉFÉRÉE - le bordeaux. dérive du rouge, tout est dans la nuance comme avec lui. couleur appelant à la passion, l'érotisme. elle devient violence et colère quand il faut. pépite d'émotions contradictoires. comme lui.
SAISON PRÉFÉRÉE - l'hiver. le froid qui frôle sa peau. la neige qui vient rendre le paysage immaculé et aseptisé de toute couleur. la froideur des nuits, à la recherche de la chaleur d'une peau contre la sienne. l'hiver, cette saison qui marque le vide dans son coeur. le vide dans son âme.
HOBBIES - la lecture d'abord. ses yeux qui arrachent les mots de ses livres favoris. assis dehors, sur les marches parfois froides, à lire, à s'imprégner de ce monde imaginaire qu'il crée à chaque fois. puis l'écriture. personne ne le sait. mais il écrit. il écrit tellement qu'un ouvrage est en passe d'être fini. un ouvrage qui dépeint la déchéance d'un artiste incompris. un artiste mal aimé. sûrement un peu tout ce qu'il a été ou voulu être. talent de la plume qu'il maitrise avec une justesse folle.
ANIMAL TOTEM - Le coyote. Animal qu'on ne cite que rarement. Double visage comme le sien. Il s'adapte, il est un paradoxe à lui seul. On ne le cerne pas et pourtant, on rêve d'y arriver. Prouesse exultante de masquer la vérité d'apparences du chaos au profit d'illusions pleine de beauté. Pleine de mensonges aussi.

(FAMILY PORTRAIT) y a son regard de gamin perdu. y a son regard de gamin qui veut attirer l'attention. y a son regard qui se perd sur sa mère. Elle est effacée. Ses yeux brillent plus. Ils sont vides. Comme son âme. Y a son père. Il est là. Au bout de la grande table – à se préoccuper des chiffres de la bourse. Pas un regard. Pas un coup d'oeil vers le gamin qui veut se dévouer pour obtenir un peu d'amour de sa part. Y a ce cœur qui appel au secours et les mots qui ne quittent pas sa bouche. Silencieux, brisé et désolé. Il est désolé le gamin de pas être à la hauteur. Il est désolé le pauvre gosse de préférer lire et écrire plutôt que de s'intéresser à ce monde du luxe. Il se cache pour vivre. Il vit pour se cacher. Il esquive son père comme son père l'esquive. Les mots fusent à peine. Et quand ils le font, ce sont des lames assassines qui déversent une rage étouffante. À qui gagnera le premier. À qui tuera l'autre le premier. Après, y a eu son regard d'adolescent. Y a eu son regard de type qui a grandi et qui a compris. c'est la vie, pas le paradis, putain. Refrain de son quotidien. Révolte évidente d'une âme qu'il voulait pas pourrir. Pourrir par l'argent, par le pouvoir et les manipulations qui vont avec. Il a choisi de dire, non. Il a choisi de dire, merde. Quitte ou double – il a perdu. Relations familiales au point mort. Pas un appel. Pas un coup de fil. Mère obligée de se cacher dans les chiottes aux dorures hors de prix pour lui écrire parfois. Quelques mots dans un message qu'il ne prend même plus la peine de relever. C'est fini le temps de l'innocence. C'est fini le temps où il croyait encore être aimé. Il a gagné sa liberté. Cette putain de vie de solitaire. Soif idéale d'une vie intense, à l'encontre des esprits étriqués. À l'encontre des culs serrés de cette société bourgeoise sur laquelle il pourrait gerber son mépris. De ses parents, ils restent des clichés. Ils ont pris la poussière depuis ce temps. Ils restent des souvenirs dans un coin de la tête. Pas les souvenirs qui font rire. Qui font sourire. Qui font chialer. C'est les souvenirs qui dévorent, qui tuent et qui brisent sa carcasse. Alors il ignore. Il avance. Mon père, ce héros raté. Qu'il pense en se marrant, la clope coincée entre ses lèvres. Ma mère, cette idiote soumise. Qu'il se dit l'air triste quand les arabesques de fumée quittent sa bouche. Nicotine bouffant ses veines, quand sa famille est venu le bouffer de l'intérieur depuis toujours.

(BLOODSTREAM) La littérature, c'est sa vie. Ça le conditionne depuis gamin. Lire pour s'évader. Écrire pour rêver. Déployer ses ailes dans une autre sphère, comme ça, pour la forme. C'est sans mal qu'il est devenu ce professeur apprécié et reconnu. À l'aise avec ses élèves. À l'écoute. Pédagogue pour faire apprécier à ces derniers les œuvres les plus énigmatiques de ce monde. Puis séducteur. Pêché ultime pour les saints de ce monde. Il aime attiser, regarder, épouser de ses yeux puissants les formes scandaleuses de ses élèves. Elles sont là. Le regard farouche. L'attitude intimidée. Uniforme dévoilant la peau de porcelaine de leurs jambes si fines, si attirantes. Elles sont des tentatrices. Lui est si faible. C'est ainsi qu'il a fait le con. Métaphore courue d'avance de sa vie à l'effet domino. Il a séduit. Trop. Sans s'en rendre compte. Elle était belle cette blonde. Chevelure dorée qui tombait en cascade dans son dos. Lèvres à peine rosées et souvent pincées en le fixant. Ça faisait brûler sa peau, ça faisait grogner son corps. Il s'est rêvé à la baiser à même le bureau. Se faufiler entre ses cuisses pour les embrasser, les désirer, les griffer. Il s'est rêvé seul maître à bord pour la dévorer comme le loup dans la bergerie. C'était fort. C'était charnel. Ça aurait pu s'arrêter là. Ces regards, ces gestes, ces silences. Puis elle a disjoncté la gamine. Elle est tombée folle amoureuse de lui. L'amour. Oh, l'amour. Il n'a jamais aimé. Il ne l'aurait pas aimé. Pas autrement que comme un jouet. Comme un désir à vivre et à faire vivre. C'est tout. Elle, c'était autre chose. Le cœur battant. Les lèvres tremblantes quand il l'approchait. Alors elle a menti. Fille à papa qui est allée salir sa réputation. Qui est allée ternir ce qu'il a été et ne serait plus. Elle a parlé d'un amour fort entre eux, d'une envie d'exil sur d'autres terres. Elle a parlé de la manière dont il est venu la toucher si souvent. Puis tout s'est cassé la gueule. Empire venant s'écraser sur le bitume. Comme l'âme disloqué du littéraire. Il a perdu son boulot. Il a perdu sa crédibilité. Il a tout perdu. Une rafle sur son passage. Touché, coulé. Elle est venue le tuer la gamine et elle regrette pas. Putain de garce qu'il a eu envie d'étrangler de ses mains. Voir son souffle se couper. La voir crever là à genoux devant lui. Haine encore profonde au creux de sa chaire.

(WHERE IS MY MIND) Il a perdu gros à cause de la garce. Son nom terni par la une de certains journaux. Le fils Lynch qui s'est entiché d'une gamine de dix-sept ans. Le scandal a bouleversé sa vie – comme celle de la famille au complet. Fossé se creusant encore plus entre lui et son père. Alors, Clayton a erré. Seul. Les clopes comme meilleures compagnes. Les verres de bourbon comme un plaisir amer. Il s'est renfermé sur lui. Il n'a parlé à personne durant des mois entiers. Il n'a pas essayé de faire le moindre effort. Perdu. Solitaire. Souillé. Il a griffonné les pages blanches de son calepin pour décrire sa haine, pour cracher des mots. De cette période, il ne se rappelle que son regard triste. Vide. Pupilles quasiment dilatées par la rage et l'amertume. Il a cru tenir bon. Il a cru se relever. Mais Londres, oh belle Londres. Même cette ville est devenue fantomatique. Un cauchemars vivant pour l'écrivain. C'est sur un coup de tête qu'il a choisi de se barrer. C'est sans réfléchir qu'il a bouclé quelques valises pour se tirer. Abandonner les souvenirs, abandonner cette vie qu'il n'était plus la sienne. S'abandonner lui aussi. Il a choisi de se barrer dans cette ville de l'inconnu. Acheter un vignoble sans rien y connaître – sauf le le goût bien agréable d'un bon vin. Une vie aux antipodes de ce qu'il était. Une vie qui devait le réanimer. Lui faire oublier les souvenirs. Lui permettre de rebondir. Sa carcasse vit dans cette grande baraque – vue première sur les vignes. Tout y est rudimentaire. Il n'a besoin que d'un bureau, que d'un ordinateur, un calepin, un stylo. Il n'a besoin que de ça pour survivre. La garce est encore dans son esprit. Il se réveille parfois, le corps en sueur l'imaginant de son rire sarcastique le salir et le bouffer. Il pourrait tuer pour que ce souvenir s'éteigne. Pour que tout ça cesse.

(PERFECT DRUG)  Bâton de nicotine qui ronge ses lèvres. Regard se perdant vers ce type. Putain qu'il grogne en le voyant. Fils à papa capricieux, trop con sur les bords. Tout ce qu'il déteste. Typiquement le genre de mec qui aurait pu obtenir les grâces de son père à lui. Monsieur confiance. Monsieur connard. Les termes se succèdent. Et le désir grimpe. Quoiqu'il dise. Quoiqu'il clame. Concurrence à peine éhontée entre le vigneron et le brasseur. Au fond, Clay s'en fou du fric. Il s'en fou de voir son vignoble apprécié par les habitants et les touristes de passage. Il est venu se perdre ici pour retrouver la paix ; pour s'éloigner du portrait nommé monstre que les autres ont fait de lui. Le brasseur c'est autre chose. Il grince les dents. Il pique de ses remarques acides et cyniques. En guise de réponse, c'est un sourire de con qui étire la bouche de l'anglais. Il l'écoute, il le regarde s'agiter et agir comme le roi du monde. Il murmure dans le vague des paroles qui n'en sont pas. Il le déteste. Si fort que parfois, son poing rêve de s'écraser contre sa belle gueule pour le faire taire. Lui apprendre un peu la vie, à celui qui croît tout connaître d'elle. Et d'autres fois, y a ce tourbillon qui gronde. Ça lui prend les tripes. Ils se croisent. Ils se testent. Ils s'envoient chier pour mieux s'ignorer. Et ils se croisent à nouveau. Chemins destinés à ne pas se séparer, à s’entrechoquer à chaque fois. Il le détaille. Il le déshabille de son imaginaire. Le feu grimpe. La chaleur dévaste sa chaire. Il se rêve à lui ronger la bouche. À mordre sa peau. À faire sauter ses fringues et détailler chaque pore de sa peau. Il veut parfois lui dire à quel point ce désir est féroce. Un peu trop pour lui, même. Le plaquer contre un mur et s'enivrer de son odeur pour qu'il soit sien. Quelques minutes. Quelques heures. Peu importe, le temps perdrait de sa cadence avec lui. Sensation rare éprouvée par le vigneron. Fierté trop aiguisée pour l'avouer. Fierté trop féroce face à lui. Comme cette envie. Comme ce besoin. Alors il se mure dans le silence. Cœur de glace. Âme de pierre. Il préfère fermer les yeux et voir son corps cogner contre le sien. Ses dents s'arracher à son échine et ses lèvres le posséder. Lui, le petit con qui chamboule peut-être trop son existence.