she's thunderstorms (anaïs)

l’heure est probablement déjà bien avancée, alors que dehors le ciel s’assombrit progressivement. elle sent déjà le calme si particulier de la nuit qui s’échoue sur elle, se répand dans son organisme et réveille un peu plus chacun de ses sens. c’est probablement l’indication qu’elle est là depuis bien plus de temps qu’il ne le faut, pourtant elle ne bouge pas plus, le regard perdu sur les quelques personnes qui traînent encore dans la salle. ceux qui ont probablement une vie bien trop meublée pour trouver un créneau plus raisonnable pour venir s’user le corps. ou peut-être ceux qui préfèrent aussi le susurrement délicat du vent nocturne qui s’infiltre entre les bâtiments éteints.
encore une fois, sa journée avait un air de routine qui l’avait éreintée. les aléas trop banaux d’une vie qu’elle se refuse ardemment depuis toujours, de peur que son coeur ne supporte l’ennui qui l’accompagne. parce qu’elle aime le goût de l’inconnu, la chaleur de l’imprévu, les couleurs d’un lendemain qui sont bien différentes que celles du présent. probablement qu’elle ne devrait pas, se risquer à rejeter et repousser toutes ces obligations qu’elle méprise, pour ne vivre que dans une liberté brute et sauvage. mais elle aime bien trop ça pour se plier à quelconque règles.
venir ici, c’est certainement l’une des seules constantes de sa vie qu’elle accepte. ça lui est même probablement indispensable, quand elle sent qu’elle est au bord de l’implosion et que ses mains ont besoin de s’érafler contre le tissu des sacs pour extérioriser toutes ces tensions. encore une fois, elle est légèrement excédée, alors qu’elle sent que malgré la bonne heure qu’elle a passé dans la pièce n’a pas totalement effacé toute trace d’énervement de son système.
elle est irritée, et le restera. son regard qui balaie légèrement la pièce se pose finalement sur une silhouette bien trop peu anodine pour ne pas s’y attarder. immédiatement, elle reconnait anaïs, et vient la rejoindre lentement, espérant y trouver un remède à ses pensées qui fulminent bien trop dans son esprit.
j’te dérange?  et comme à chaque fois qu’elle a le coeur qui bat un peu trop furieusement, elle cherche à la taquiner. égoïstement, elle veut l’énerver, pour qu’elle partage le sentiment avec elle. avec elle, c’est soit l’un soit l’autre, mais elle n’est pas d’humeur aux élans d’affection et aux discussions enjouées.
je m’en fiche un peu, remarque. et comme ça, elle lui impose sa présence sans s’enquérir de sa réponse. espérant qu’elle trouvera une distraction plus intéressante à ses côtés, alors qu'elle vient s'asseoir par terre juste à côté d'elle. bien décidée à ne pas bouger.

il fait tard. la nuit est éclairée par quelques étoiles qui brillent ici et là, annonçant un jour meilleur pour le lendemain matin. les lampadaires dessinent des ombres sur les trottoirs et tu t'amuses à les écraser avec ta planche de skate. tu slalomes entre ces quelques passants, sans doute à la recherche d'un bar dans lequel squatter à une heure aussi avancée. les écouteurs dans les oreilles, tu bouges légèrement la tête au rythme de la mélodie qui parcoure ton corps tout entier. il est tard et tu ne travaille pas ce soir. t'en profites donc pour te rendre à la salle. ça fait une éternité que tu n'y as pas mis les pieds... façon de parler. c'est juste que d'habitude, tu essaies d'y aller beaucoup plus régulièrement. ça fait quatre jours que tu n'as pas enfilé tes gants. il te manque, c'est vrai or, la fatigue a eu raison de toi. le vent caresse délicatement ta peau et balaie tes cheveux en arrière. heureusement, ce n'est plus très loin car le froid commence à se faire ressentir.

tu sautes de ta planche pour la récupérer à la main et pénétrer à l'intérieur. il n'y a pas beaucoup de monde et c'est bien mieux ainsi. tu salues jean et parles quelques instants avec lui en adressant des petits signes de la main ou des hochements de tête à l'attention de tout ce beau monde. quelques minutes plus tard, tu te diriges vers les vestiaires pour te changer. l'odeur du cuir te remplit les narines à la minute même où tu sors tes gants de ton sac de sport. tu ne les mets pas tout de suite, décidant de t'échauffer dans un premier temps. quelques exercices, quelques longueurs et plusieurs tours de cordes à sauter plus tard, tu te sens prête. tu attrapes tes affaires et tu décales vers les petits punching ball suspendus. tu les frappes doucement. tu accélères le mouvement petit à petit. tes poignets sont chauds, prêts à tout casser s'il le fallait.

c'est alors que sami fait son apparition. elle te demande si tu la déranges et tu secoues la tête de gauche à droite, trop prise par ton exercice. lorsque tu as fini de frapper, tu l'entends rajouter que de toute façon, elle s'en fout. tu lèves les yeux au ciel en tapant machinalement tes gants entre eux. ça y est, madame est de mauvaise humeur. moi aussi je suis ravie de te voir sami ! tu lui adresses un léger sourire en clignant des yeux tandis qu'elle s'installe à tes côtés à même le sol. mais, qu'est-ce qu'elle fout au juste ?

comme un vague à l’âme moite qui l’étreint, lui colle à la peau. autour d’elle, tout semble trop éteint, trop dénué de vie pour parvenir à rallumer la flamme faiblarde de son intérêt. avec la nuit, s’est réveillé un ennui féroce, qui lui creuse les entrailles un peu plus à chaque soupir qui dégonfle ses poumons. elle entendrait presque les plaintes de son coeur aux palpitations molles. l’organe semble troué quelque part, et se vide de toute sa ferveur. elle est creuse. alors, comme à chaque fois que l’air prend de goût d’amertume et que les secondes s’étirent trop à son goût, elle sait qu’elle pourra retrouver un peu de chaleur à la salle.
que ça soit par le biais de personnes, ou simplement en allant chercher l’épuisement. c’est simplement comme ça que ça fonctionne, le seul remède un tant soit peu efficace pour vaincre la morosité du quotidien. et évidemment, quand ses pupilles s’échappent jusqu’à la silhouette bien familière d’anaïs, elle s’en approche sans réellement savoir pourquoi. ni sans réelles raison, si ce n’est celle de laisser libre court à cette frustration qui la hante.
c’est toujours comme ça, avec elle. elle se fiche de savoir si elle l’énerve, et se contente simplement de chercher à l’ennuyer. par ce pur égoïsme qui lui pourrit les veines. toujours ce même manège vicieux, lorsqu’elle n’est pas d’humeur à être affectueuse ni même décente avec elle. elle ne s’en doute probablement encore pas, alors que sa seule réponse est un hochement négatif de tête, pour lui signifier que sa présence ne la dérange pas. tout ça risque certainement de changer, dès qu’elle aura compris l’état d’esprit dans lequel elle est. un joyeux bordel, en somme. se laissant tomber au sol, ses mots commencent de lui esquisser un sourire. toujours aussi amusant.
je m'emmerdait, j’me suis dit que je viendrais prendre un peu de tes nouvelles. y’a une part de vérité qui coule de ses mots, parce que malgré tout ça faisait probablement un moment qu’elle n’avait pas discuté avec elle. peut-être que finalement elle réussirait à dissiper cette exaspération qui l’irrite sans qu’elle n’ait à la titiller. même si elle en doute réellement. appuyée sur ses mains, elle continue de la fixer en cherchant comment parvenir à attirer son attention.
alors dis-moi, toujours amoureuse d’alan? ça risque de fonctionner. pour une fois, la réponse l’intéresse réellement. y’a ces non-dits entre les deux quand elle évoque le sujet, ces silences qui semblent un peu trop bruyants. et puis elle imagine que c’est un sujet sensible, elle espère en tout cas.

sami, elle est cool quand elle le veut du moins, sa présence peut être agréable quand elle y met du sien. t'arrives à la supporter parce que tu as beaucoup de patience et ça, c'est une véritable qualité. tu arrives généralement à prendre sur toi malgré ton franc parlé légendaire avec les personnes qui te sont proches. c'est peut-être parce que tu ne la connais pas vraiment et que t'oses pas être trop crue à son égard. tu n'as pas envie qu'elle ait une mauvaise image de ta petite personne ou qu'elle se fasse des fausses idées à ton sujet. y a une part de ça, c'est vrai que t'es une fille réservée qui n'aime pas se faire remarquer. t'as pas envie que toute la salle porte ses yeux sur toi parce que tu as haussé le ton. encore moins parce que t'as eu l'audace de lui mettre un poing en pleine figure. alors, tu te tais. tu lui adresses même un léger sourire pour lui prouver que sa présence ne t'importune pas tant que ça. t'es pas super convaincue mais, ça ne se voit pas vraiment. t'es concentrée sur ton exercice, tu te dis qu'à t'observer, elle finira par en avoir marre. tu te dis que peut-être qu'elle prendra exemple sur toi et se mettra au travail. elle a surement besoin d'une motivation extérieure. tu frappes plus fort comme pour l'inciter à enfiler ses gants et te rejoindre.
ce n'est pas ce qu'elle fait. elle a une autre technique. un sujet de conversation qui te fait rater ton coup. tu frappes à côté telle une débutante et tu finis par te mordre la lèvre en remarquant ta connerie. non seulement tu ne rates jamais ton coup mais, en plus de t'avoir coupé dans ton élan, elle se permet de te poser une question au sujet d'alan, de quoi éveiller les soupçons. tu secoues la tête comme pour à la réalité et tu hausses les épaules d'un air indifférent. je ne vois pas du tout de quoi tu parles. j'suis pas amoureuse d'alan. tu fronces les sourcils, renifles un coup et reprends ton exercice là où tu t'es arrêtée. t'as pas envie de te laisser déconcentrer par la demoiselle. pas ce soir. si elle a passé une mauvaise journée, c'est son problème à elle et pas le tien. elle n'arrivera pas à gâcher ta séance avec sa mauvaise humeur.

elle sait pas réellement d’où vient cette motivation obscure qui la pousse à vouloir égoïstement chercher. à réveiller la fureur, à s’attirer les foudres des personnes sans motif valable. simple besoin de ne pas être seule dans son état, ou alors ce besoin malsain de se rejouir des traits dévorés par la colère d’autrui. c’est probablement un mélange des deux, peut-être un peu d’autre chose dont elle ne parvient pas réellement à saisir l’essence. mais la vérité c’est qu’en général, ça fonctionne. elle en ressort avec les nerfs moins à vif, le coeur moins au bord des lèvres prêt à déverser toute ses passions. ou alors elle en ressort encore pire qu’avant, avec ce brasier qui déchire et qui consume tout autre sentiment qui pourrait venir l’effleurer.
pas de compassion, pas d’affection alors que malgré tout anaïs ne lui a pas réellement fait quoique ce soit d’irréprochable. mais elles sont habituées à ces joutes verbales un peu trop violentes, abrasives même entre elles de temps en temps. certainement parce qu’entre elles le ton peut très aisément monter, et la situation passer de calme et idyllique à catastrophique et apocalyptique. c’est ce qu’elle souhaite, aujourd’hui. et c’est très probablement ce qu’elle obtiendra si elle laisse libre court au sarcasme qui lui brûle le bout de la langue.
lorsque ses mots viennent s’échouer au creux des oreilles d’anaïs, y’a ce léger sourire qui lui déchire les lèvres sans qu’elle ne puisse le contrôler. parce qu’elle a cette impression d’avoir sans réellement savoir touché un point sensible. c’était un tir dans l’inconnu, un foutu coup de chance qui semble avoir porté ses fruits. la perspective de poursuivre cette piste semble la plus intéressante, alors elle se relève doucement pour plonger ses yeux dans les siens.
ah? c’est pas ce qu’il m’a dit pourtant. air faussement surpris, pour tenter de crédibiliser son mensonge. parce qu’alan ne lui a absolument rien dit, mais que s’il y a quelque chose à gratter de ce côté là, elle sait que de le faire croire fera forcément réagir.
j’suis déçue j’pensais que tu m’aurais au moins dit ça. maintenant, c’est une pseudo déception et un froissement artificiel qui anime son faciès. elle est presque envoûtée par son propre mensonge, jusqu’à en ressentir les picotements sous les côtes. mais non, c’est toujours l’amusement qui garde le dessus. et la curiosité, parce que malgré tout, alan reste une personne relativement proche d’elle, et l’optique d’en apprendre un peu plus sur ces secrets qu’il garde si jalousement rend la chose d’autant plus attractive.

tu ne t'attendais pas à ce que sami te rejoigne du moins, pas maintenant. tout simplement parce qu'elle vient d'arriver par conséquent, tu te dis qu'elle va sans doute s'échauffer. c'est d'ailleurs ce que tu es en train de faire et y a clairement rien de bien intéressant là-dedans autrement dit, aucune raison de rester à tes côtés. sauf que voilà, est il questionne de sami et tout le monde sait que si elle est inscrite à la salle, c'est avant tout pour casser les pieds aux gens. à vrai dire, tu te demandes ce qu'elle fout encore ici parce que clairement avec son tempérament, tu te dis qu'elle a déjà du en casser des mâchoires et que c'est carrément pas toléré ici.
tu te dis aussi que malgré le fait que tu arrives à prendre sur toi un jour, peut-être que c'est toi qui va péter les plombs et lui mettre volontairement une patate entre les deux yeux au moment où elle s'y attend le moins. t'es pas de nature violente. à vrai dire, t'as jamais fait de mal à une mouche. t'es incapable de réagir méchamment et t'es le genre de filles à la pensée bisounours. en effet, tu vois le bien partout et le positif en chacun. chez sami, c'est difficile. tu te dis qu'elle doit compenser un manque alors, t'essaies d'être présente pour elle. t'es comme ça toi. tu parles jamais de tes problèmes, t'es discrète et réservée mais, lorsqu'il s'agit d'aider les autres alors, t'es toujours là, prête à donner des bons conseils et à distribuer gratuitement des sourires à la pelle.
finalement sami, elle aborde le sujet alan. forcément, t'es un peu surprise. tu ne sais plus vraiment quoi dire sur le coup. tu tentes de rester passive or, tu rates un mouvement qui t'oblige à arrêter. un ton détaché et on ne peut plus basique, tu lui réponds que tu n'es pas amoureuse d'alan. t'as l'impression d'être à l'école maternelle et tu te retiens de lui faire une réflexion là-dessus. ah ouais ? et, qu'est-ce qu'il a dit exactement ? parce que si elle veut jouer à ça, autant qu'il balance les informations jusqu'au bout. t'es presque persuadée qu'elle ne sait rien. d'ailleurs, elle rajoute qu'elle est déçue et toi, tu lèves les yeux au ciel en soupirant fortement pour lui montrer ton agacement. peut-être que je t'ai rien dit parce qu'il n'y a rien à raconter ? t'es vraiment parano, j'te jure ! tu secoues la tête en resserrant davantage tes mitaines.
et si elle savait quelque chose sami ?

la seule chose pour laquelle anaïs était fautive à l’instant, c’était probablement d’avoir été présente au mauvais endroit, au mauvais moment. plus précisément, d’avoir envahi son champ de vision quand y’avait cette irritation qui lui coulait le long de la gorge. certainement qu’elle y était habituée à force, à ces sautes d’humeur incontrôlables qui l’agitait à chaque fois qu’elle passait la porte de la salle. mais c’était logique, puisqu’elle ne s’y rendait que quand elle n’arrivait plus à supporter toutes ces passions qui lui ravageait le corps. qui lui meurtrisent même le palpitant. quand tout est trop fort, elle est bien obligée de l’éteindre d’une façon où d’une autre. et aujourd’hui, c’était anaïs qui alimenterait sa flamme.
mais au fil et à mesure que la conversation se déroule entre elles, que les mots s’échangent et que les regards se croisent maladroitement, elle commence à penser que finalement elle va peut-être regretter l’issue de la rencontre. parce qu’elle a pas cette réaction aussi volcanique et brutale que ryan, mais parce qu’elle a pas non plus un calme olympien pour supporter les piques éhontées qu’elle lui lance. elle est pas non plus idiote, quand elle évoque le sujet d’alan, en tentant de l’éviter gracieusement  en niant tout en bloc. c’est presque convaincant, mais elle a pas réellement d’autre angle d’attaque. elle ignore presque tout de sa vie à anaïs, si ce n’est ce qu’elle lui autorise à entrevoir, et le reste qu’elle imagine facilement. toute cette histoire avec alan c’était la seule chose qu’elle avait trouvée trop suspicieuse pour ne pas appuyer dessus, et peut-être que ça serait suffisant pour la faire faiblir.
sa réponse lui efface cette satisfaction de la bouche, pour y nicher une déception apre. peut-être qu’elle a fait fausse route, finalement. et que tout ça lui apparaît comme une distraction amusante, de la voir chercher à gratter là où il n’y  a finalement pas l’once d’une révélation à déceler.
rien que tu ne saches pas, j’imagine. goût d’échec qui lui arrache un peu plus ce plaisir qu’elle commençait à prendre à chercher à trouver ses limites. elle est bien plus compliquée à énerver, bien plus dans la retenue que ce qu’elle ne pensait. mais y’a les premiers signes d’un agaçement qui étirent son visage, et c’est juste assez pour lui permettre de rebondir.
j’te crois peut-être finalement. en tout cas tu devrais y songer, ça te rendrait certainement moins à cran si tu te tapais quelqu'un.
soupir qui vient faire écho au sien, alors qu’elle s’appuie légèrement sur le sac de frappe. peut-être que ça fera l’affaire, finalement.

pour faire simple, tu commences à la connaître sami. rare sont les fois où vous arrivez à vous parler correctement. heureusement, t'as de la patience et ton sang froid te permet de faire en sorte que chaque interaction ne se transforme en une troisième guerre mondiale sans fin. tu sais exactement pourquoi elle agit de la sorte et tu sais encore mieux ce qu'elle attend de ta personne.en effet, y a des gens qui ne supportent pas être triste ou énervé seul dans leur coin alors, ils se permettent de partager cette once de négativité avec leur entourage. généreuse comme elle est, sami ne se prive pas pour t'attaquer de plein fouet alors que tu n'as rien demandé à personne. t'es tranquille dans ton coin en train de frapper dans ton sac et tu aimerais poursuivre sans qu'il n'y ait d’embûche. elle en a décidé autrement.
elle insinue une quelconque relation avec alan. tu te dis que ce n'est pas possible, qu'il n'a pas pu parler de quoique ce soit avec la jeune femme. tu te dis aussi qu'elle essaie de te faire marcher alors, elle si tu n'es pas très à l'aise sur le sujet, tu décides de poursuivre la conversation comme si de rien était. tu lui demandes des détails, consciente qu'elle se sera sans doute quoi répondre. bien vu, elle est tout de suite moins enthousiaste et toi, ça te fait sourire. j'imagine aussi. évidemment qu'elle ne sait rien sami. elle ne sait rien parce que toi-même tu es perdue, toi même tu ne sais que penser. avec alan, c'est compliqué en ce moment et s'il y a bien une personne capable de s'éclairer sur votre relation, c'est lui. sans doute pas sami. sami qui insinue que tu es à cran. t'avais repris les frappes et celles-ci s'intensifie à mesure qu'elle ouvre la bouche. t'as juste envie que le coup parte de travers et qu'elle se le prenne dans le nez. en attendant tu souris face à ses attaques. quelqu'un ou alan ? parce que je pensais peut-être me taper côme à l'occas. il est plutôt pas mal à vrai dire. tu hausses les épaules comme si de rien était. si elle a envie de jouer sur les touches de la sensibilité alors, toi aussi tu peux appuyer là où ça fait mal. ton sourire ne s'efface pas d'ailleurs, t'en rajoutes même une couche histoire qu'elle comprenne que ce n'est pas le bon moment ni le bon jour pour t'emmerder. comme c'est juste ton ex, je suppose que ça te dérangerait pas ?! j'veux dire, tu l'as bien quitté pour une raison donc... la voie est libre, pas vrai ?! tu lui poses à ton tour certaines questions sans pour autant tourner la tête vers elle. tu frappes toujours, les poings serrés comme si de rien était, comme si cette conversation n'était pas importante pour toi, juste un échange de banalités.

ce qui était censé n’être qu’un simple jeu duquel elle tirerait elle-même les ficelles commence à prendre une toute autre teinte. le genre de tournure abrupte qui ne présage absolument rien de bon, alors qu’elle sent petit à petit le contrôle de la situation lui échapper et glisser de ses doigts. pour se retrouver à son plus grand damne dans les mains un peu trop habiles d’anaïs. et elle bout de l’intérieur, à l’instant même où elle devine au fond de son regard qu’elle n’est pas même une once déstabilisée, et que peut-être même elle en est amusée. pourquoi donc? y’a cette impression qu’elle ne sait pas tout, qu’il y a un détail infime qu’elle a négligé et qui aurait dû l’empêcher de venir se frotter à elle.
à mesure que ses réponses se font plus détâchées les unes que les autres alors qu’elle évoque le sujet d’alan, elle sait qu’elle n’a pas appuyé au bon endroit. ou alors qu’elle n’est pas suffisament armée pour sortir victorieuse de cet échange houleux. pourtant elle le sait, que ça n’est pas rien. que derrière la pseudo retenue et un détachement chaloupé qui lui colle à l’épiderme, elle a touché un point sensible.
mais sa prochaine phrase lui fait ravaler cette assurance qu’elle avait. lui fait ravaler ses mots aussi sèchement, lui enserre la gorge. comme un maelstrom de sensations toutes plus contradictoires les unes que les autres. des nuances de surprise, alors qu’elle ne s’attendait absolument pas à ce que la conversation finisse par graviter autour de lui. surtout qu’elle n’avait aucunes idées qu’anaïs était au courant de cette partie de sa vie qu’elle avait ensevelie avec tant d’application. puis cette colère épaisse et sombre, qui remonte de ses entrailles. qui menace d’éclater brusquement, et de l’étouffer dans le processus. mais non, ça serait trop simple. ça lui offrirait la satisfaction d’avoir gagné, en la faisant perdre toute once de sang froid qui lui restait.
je sais qu’il est pas mal, j’ai des bons goûts. comment tu sais ça, d’abord? chaque mot est un peu plus articulé, un peu moins rapide à briser le silence. au fur et à mesure que sa phrase s’étire, y’a ses ongles qui viennent dévorer ses paume, y imprimer une myriade de lunes écarlates. amertume déposée sur le bout de la langue, et les relents du brasier qui lui consume l’estomac, la carbonise de l’intérieur. putain. désolée de te décevoir mais il a une meuf. arrange-toi avec elle. et même ça, ça fait atrocement mal à dire. parce que ça lui donne ce soupçon de vérité qu’elle ne réalisait pas encore. mais elle chasse ce pincement qui lui tord le palpitant bien vite, pour regagner un semblant de contenance.

le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle a tiré la bonne carte. en effet, alan est un sujet sensible auquel tu ne t'attendais pas à être confronté de si tôt. est-ce que tu as laissé paraître quelque chose ? pourtant, vous ne vous êtes pas montrés ensemble depuis cette fameuse nuit qui a tout bouleversée dans ta tête. tu ne comprends pas vraiment ce qu'elle sait. est-ce qu'alan aurait réellement parlé de toi à sami ? tu en doutes. il n'aurait pas fait une telle chose alors que vous n'en avez même pas parlé. est-ce qu'il se confie à elle habituellement ? c'est là que tu te rends compte que vous avez des lacunes. tu ne sais pas assez de choses à son sujet et c'est seulement maintenant que tu désires en connaître davantage. il faudrait vraiment que tu lui parles à alan. faudrait que tu trouves le courage de le faire. pour le moment celui-ci, tu l'utilises avec sami. tu fais en sorte qu'elle ne décèle rien. tu essaies de rester stoïque. tu prends un air détaché et tu comprends qu'elle n'en sait rien. elle ignore tout de votre relation.
alors, tu décides de tourner le truc à ton avantage. tu décides de l'attaquer sur un sujet que tu connais. tu décides de parler de côme. au moins, ça atténue les soupçons sur alan. ensuite, ça fait chier sami même si tu sais qu'elle va tout faire pour montrer qu'elle gère la situation. en effet, c'est toi qui as les cartes en mains et tu ne peux pas être plus heureuse et confiante. tu essaies de ne pas rire. tu gardes ton sérieux et tu la vois changer de couleur même si elle tente de rester neutre. t'as tes sources, j'ai les miennes. tu hausses les épaules d'un air détaché. tu les as vu plusieurs fois ensemble, notamment à la sortie de la salle alors forcément, t'en as conclue qu'ils étaient ensemble jusqu'à ce qu'ils traînent séparément. tu ne connais rien des détails mais, c'est suffisant pour la faire mettre ses moyens. tu observes ses poins se serrer et ça te fait doucement rire. chacun son tour !
et puis là, elle t'annonce qu'il est en couple avec une autre meuf qu'elle. elle montre rien mais quelque part, t'as envie de lui dire à quel point t'es désolée. t'es pas une fille méchante. tu voulais juste taper là où ça fait mal comme elle elle a tenté de le faire. finalement, c'est plus fort que toi. ta personnalité prend le dessus et tu grimaces légèrement. j'suis désolée sami... tu sais pas comment elle va le prendre. mal tu supposes mais bon, tant pis au moins, tu auras dit ce que tu avais à dire !